Jean-Louis Borloo : « L’illusion du parti unique à droite ne tient plus »

de | 2012-11-20

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Jean-Louis Borloo suit de très près la crise qui secoue l'UMP. Le 21 octobre à la Mutualité, le président du Parti radical, ancien ministre de Nicolas Sarkozy, prenait la tête de l'Union des démocrates et indépendants (UDI) avec l'ambition de faire revivre le centre droit. Tout en affirmant clairement son alliance avec l'UMP, il ne cachait pas son objectif de devenir "la principale force politique d'opposition". Il lance aujourd'hui l'offensive dans un entretien au Monde.

Comment interprétez-vous la crise à l'UMP ?

On pourrait n'y voir qu'une querelle d'hommes, après tout compréhensible compte tenu de l'enjeu, mais c'est beaucoup plus profond que cela. Deux lignes s'affrontent à l'UMP, assez irréductibles. Elles reflètent les tensions qui agitent la société française, soumise à une crise économique et sociale de grande ampleur et à la perte de ses repères. Les gens ne savent pas quel est leur avenir, si bien que les peurs montent à une allure vertigineuse.

L'UMP de 2002 avait deux flotteurs. Aujourd'hui, le flotteur droit de l'UMP, qui cherche à bloquer les peurs en exaltant le repli, a le vent en poupe, et l'a emporté sur le flotteur gauche, qui se présentait comme plus social et plus humaniste. Du coup, l'illusion du parti unique, qui tentait de rassembler la droite décomplexée, la droite modérée et le centre droit, ne tient plus. On sent le phénomène monter depuis longtemps, mais aujourd'hui c'est acté. Il y a un problème de cohérence idéologique.

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Mettez-vous en cause le discours identitaire de Nicolas Sarkozy ?

Ce genre de procès ne m'intéresse pas. Je suis d'autant plus à l'aise pour parler que j'ai quitté le gouvernement Fillon à ce moment-là, en sentant que la fiction du parti unique ne tenait plus. Depuis, je trace ma route. Face aux tentations du repli, l'UDI incarne une opposition ouverte qui défend l'entreprise, l'Europe, la tolérance l'intégration et la République.

Jean-François Copé vient d'être élu président de l'UMP. Qu'est-ce que cela change pour vous ?

Pour moi, la question des hommes n'est pas essentielle. Ce qui m'importe, c'est le cap et la vision de l'avenir que l'UMP va devoir choisir. La société en mutation impose aux forces politiques une réorganisation en profondeur. La gauche est soumise aux mêmes tensions que la droite, avec un courant guidé par le repli sur soi et la peur de l'avenir. Regardez ce qui se passe au Sénat : le gouvernement ne parvient pas à avoir de majorité. Ce n'est pas parce que Jean-Marc Ayrault manque d'autorité, c'est parce que le Front de gauche ne se reconnaît pas dans le discours ni dans la politique que mène le PS.

Votre pari est-il de dépasser l'UMP en profitant de la crise ?

Dans le coeur des gens, c'est déjà fait. L'UDI a un leader, une doctrine et un objectif. Elle commence à voir arriver des déçus de la gauche, la plus moderne et la plus ouverte, des écologistes responsables et une partie de la droite républicaine.

Comment allez-vous mener votre offensive ?

Nous voulons devenir la première force politique territoriale. Ce n'est pas un voeu pieu. Qui, selon vous, peut espérer reprendre en 2014 des villes comme Paris, Strasbourg, Toulouse à la gauche ? Qui peut espérer reconquérir le Grand Ouest et le Centre ? C'est nous. Demain, nous nous retrouverons devant les maires ; jeudi, nous défendrons cinq propositions de loi ; samedi, 

nous accueillerons nos nouveaux adhérents.

Etes-vous sûr d'être encore dans une alliance claire avec l'UMP ?

Oui. La coalition de l'UDI et de l'UMP est nécessaire pour bâtir l'avenir. Ce sont deux partis indépendants, différents, en compétition pour le leadership de cette coalition. Il y a deux visions, deux équipes. Celle de Jean-François Copé et la nôtre. L'opposition a désormais deux leaders.

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Propos recueillis par Françoise Fressoz – Le Monde – Le 20 novembre 2012